Les politiques de prévention de l'épidémie VIH/sida ont été marquées depuis quelques décennies par une forte internationalisation. Au Viêt Nam, elles ont été d'abord rattachées à la politique des « fléaux sociaux » héritée de la colonisation française, avant un changement radical intervenu au début des années 2000. Cette période, marquée par l'augmentation rapide de la prévalence du VIH et par conséquent l'intensification de la lutte contre l'épidémie, a amené les autorités centrales à favoriser une plus grande participation sociale des personnes séropositives et de leurs proches. Ces postures successives sont visibles dans les campagnes d'affichage relatives au VIH/sida dans l'espace public. A l'aide d'une approche sémiologique, nous analysons 45 de ces affiches. Les résultats montrent que les deux types d'orientation suivis, répressive puis plus participative, sont associés à des langages visuels différents, avec des références à des codes internationaux versus des contenus plus spécifiques à la culture locale. La trace visuelle des orientations politiques publiques successives est particulièrement significative en raison de la radicalité du changement et du maintien des messages précédents dans le champ visuel de l'espace public. Ces deux mouvements aboutissent à une « polyphonie » visuelle non exempte de contradictions. Ces divergences sont symptomatiques d'une tension entre deux tendances caractéristiques du pays, d'une part un souci d'intégration économique et politique dans un contexte international contraint, d'autre part la volonté d'affirmation d'une souveraineté nationale. Ces deux postures se traduisent sur le plan de la lutte contre le VIH/sida par la conformation à une orientation générale qui conditionne les soutiens apportés par les agences multilatérales et bilatérales mais également par le maintien d'idiosyncrasies.